Un diable dans la glotte ?

« Derrière un ballon de riesling moitié-vide moitié-plein, naviguons d'une digression à l'autre, devisons de l'actualité judiciaire, politique, culturelle ou tout simplement et largement sociale... en tentant d'échapper aux sentiers balisés de la bien-pensance, sans s'interdire de remarquer qu'on peut aussi aisément être le bien-pensant d'un autre. »

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Rue89, digne héritier de Libé ?

mardi XII juin MMVII

« Nous rêvons que Rue89 devienne peu à peu le point de référence obligé pour tous ceux qui ne veulent pas se contenter de "consommer" l'information et se passionnent pour la confrontation d'idées » (lien) nous disent les tenanciers de Rue89, site d'information « créé par des journalistes, dont plusieurs sont issus de Libération ».

Certains articles pourraient faire office de tests de paternités plus efficaces que l'ADN.

L'article « comment j'ai fait sauter mon amende pour excès de vitesse » annonce la couleur (lien). L'article est entièrement rédigé par un lecteur, Rue89 se contente de poser la problématique suivante : « recours abusif d'un automobiliste procédurier ou défense légitime d'un citoyen sanctionné à tort ? ». Il s'agit en fait de l'histoire d'un homme flashé par un radar fixe automatique pour un excès de vitesse minime, la vitesse retenue par le radar étant de 51 kmh au lieu de 50 autorisés, pour 56 mesurés - sans doute 60 affichés au compteur. L'auteur nous donne moultes informations sur les radars. Ainsi, « l'erreur de ce compteur est au minimum de 10 km/h pour une vitesse inférieure à 100 km/h et de 10% si la vitesse est supérieure à 100 km/h », nous affirme que le taux « d'erreur du radar [est de] 5 km/h ou 5 % ». D'où tire t-il ses informations ? Aucune idée. Le journaliste amateur sans doute protège t-il la sacro-sainte confidentialité de ses sources. Quoi qu'il en soit, pour lui, l'abandon des poursuites par l'Officier du Ministère Public était donc inévitable. Pour ma part, j'estime hautement plausible que ce monsieur n'a rien appris à l'Officier du Ministère Public et que ce dernier a surtout décidé de ne pas se fatiguer pour un excès retenu risible de 1 kmh. Rue89 ne prend pas parti mais ne cherche pas non plus à valider les informations, ne demande aucune source.

L'article suivant est intitulé « une cigarette à la sortie de la gare Montparnasse, j'écope de 68 euros » (lien). Nous est narrée l'histoire d'une femme, auteur de l'article, qui a souffert de l'application de la loi réprimant le fait de « fumer dans un lieu public couvert et clos accueillant du public ». Celle-ci est grandement mécontente de son sort, prise par surprise, manifestement scandalisée que puisse lui être reprochée une infraction qu'elle a commise. Se demande t-elle s'il était approprié d'allumer sa cigarette à la sortie de la gare Montparnasse ? Elle précise bien qu'elle était « à deux mètres de la porte vitrée automatique donnant dehors ». Mais la loi précise t-elle qu'il est acceptable d'enfumer les autres pendant les 2 derniers mètres, sans doute en-dessous les trappes des climatiseurs ? La contrevenante nous précise que l'agent verbalisateur « a eu une attitude extrêmement méprisante et hautaine ». Elle, pas méprisante ni hautaine pour un sou, de son côté, n'hésite pas, néanmoins, à faire des procès d'intention, donnant à l'agent verbalisateur un caractère raciste sans que l'on ne sache pourquoi, en ajoutant : « heureusement que je ne suis pas basanée ». Que dire sinon qu'elle n'a pas tort de craindre que « l'excès de zèle des policiers du "régime Sarkozy" [NDM : l'auteur ne reconnaît pas la démocratie ?] ne fasse que débuter » ; elle n'a pas le profil à faire l'objet d'indulgences, puisqu'elle revendique le fait de méconnaître les lois. Pour Rue89, la porte au débat est ouverte : « Amende justifiée ou non ? ». Rue89 se moque éperdument du propos diffamatoire tenu et n'a pas l'air convaincu que la loi suffise à justifier la répression d'un comportement.

Le dernier article ayant attiré mon attention est celui intitulé « un livre jeunesse trop "subversif" au centre de rétention de Lyon » (lien). Il aborde le fait qu'un livre contestant l'application des lois sur l'immigration, « Au panier » d'Henri Meunier, ait été refusé au sein d'un centre de rétention administrative de clandestins. Un « livre de jeunesse » qui puisse être « subversif », voilà qui étonne. La moindre des choses de la part de l'éditeur de l'article, c'est à dire de Rue89, eut été de vérifier le caractère subversif de l'ouvrage. L'article cite la Déclaration des droits de l'homme. Mais pas celle de 1789, non, le fourre-tout de l'ONU, qui stipule par exemple que « l'enseignement technique et professionnel doit être généralisé ». Et si cette déclaration est évoquée, c'est bien pour contester l'application des lois portant sur l'immigration clandestine, comme l'auteur le détaille dans une interview où il mentionne « l'actualité française où des enfants sont arrêtés directement en classe par la police française comme durant les plus glorieuses heures de la dite police française » (lien). L'auteur est d'ailleurs de ceux qui méprisent « tous les livres écrits pour édifier, éduquer, apprendre et ceux emplis de bons sentiments en bandoulière ». On pourrait s'attarder sur cet ouvrage, notamment l'usage qui en est fait. Ainsi, à l'heure où l'on parle d'éducation civique renforcée dans les écoles, on observe que certaines écoles, comme en atteste le document pédagogique de l'académie d'Orléans/Tours suivant lien, enseignent en cycle 2 qu'un contrôle d'identité est « une situation violente », au moyen de ce livre employé comme support - livre écrit par un auteur méprisant « tous les livres écrits pour édifier, éduquer, apprendre », rappelons-le.

En synthèse, si on peut dire que les sujets abordés ne sont dénués d'intérêt, on ne peut qu'être navré de constater qu'il existe une masse d'information absente des articles, masse d'information qui eut été utile pour transformer ces petits libelles en articles informatifs, permettant à chacun de se faire son avis en connaissance de cause.

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« 14 juin, Pas tous, non   

   10 juin, Du paradoxe d'une profession commerciale dont la déontologie interdit le commerce »

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