Qui l'eût cru ?
mercredi VI septembre MMVISi on m'avait dit, il y a quelques années, que j'en viendrais à soutenir Bruno Beausir, plus connu sous le lyrique pseudonyme « Doc Gynéco » (lien.), j'aurais assuréement pensé à un canular.
Mais voilà l'imprévu. L'imprévu, c'est Doc Gynéco qui ose nuire à la légende urbaine niaise des banlieues françaises. Il commet le sacrilège de dire l'évidence que « les banlieusards, c'est des clowns. Ils sont choqués d'avoir entendu les mots racaille ou Kärcher quand tous les jours entre eux ils s'insultent », et le ministre dont le seul talent semble être l'origine ethnique (bien vu, ce n'est pas un talent, c'est une fatalité), Azouz Begag, déclare « traiter les enfants de banlieue de clowns [...] c'est inacceptable » (lien).
On peut se demander pourquoi pour monsieur Begag, un banlieusard est un enfant - on n'ose même plus dire jeune. Mais on peut compter sur monsieur Begag pour nous bercer avec « la bonne façon de parler aux jeunes: plutôt que de brûler 15 000 voitures, d'incendier la voiture de votre voisin, de casser l'école où vont vos frères et soeurs, il y a une possibilité dans ce pays de se faire entendre: c'est aller voter ».
Quel est le message que veulent faire passer des individus, souvent mineurs, qui montrent un tel respect des biens et d'une manière générale de l'existence d'autrui ? Au nom de quel culte saugrenu devrions-nous prendre comme priorité, à l'instar du président de la République à l'avenir judiciaire incertain, les petites volontés d'une poignée d'individus ? Au nom de quoi une poignée de gamins deviennent-ils l'objet de toutes les préoccupations (éducation, sexisme, laïcité, sécurité, logement, etc), monopolisent-ils l'attention, alors qu'ils ne sont pas les seuls à avoir des problèmes. On pourrait même discuter l'idée qu'ils ont des problèmes majeurs : qu'ils aillent parler de leurs durs problèmes aux enfants du tiers-monde, du dur problème d'avoir droit à une école qui les accepte même quand ils insultent quotidiennement les enseignants, d'avoir droit à des pompiers qui les sauvent même alors qu'ils les agressent tous les deux jours, d'avoir droit à un ensemble de produits de consommation tels des habits de marque dont ils ne se privent pas ! Certes, ce n'est pas parce que l'on trouve pire ailleurs que l'on doive se contenter d'un mal, mais il faut apprendre aussi à regarder avec lucidité les problèmes que l'on évoque et jauger leur gravité. Par exemple, de manière récurrente, les tenants du discours deresponsabilité à l'égard de la délinquance nous servent une soupe stipulant que la présence de la police dans les zones de non-droit, les multiples contrôles d'identité, constituent un grave problème : la police doit-elle abandonner l'idée de rétablir le droit dans ces zones, doit-elle s'amuser par souci d'égalité à aller en Losère chercher les auteurs d'infraction qu'elle a localisé à Aulnay-sous-bois ?
Doc Gynéco a raison. Les banlieusards qui posent problème sont des clowns. Et les Begag sont leurs supporters, prêts à légitimer toute stupidité qui serait intolérable si son auteur n'était pas d'origine immigrée, prêt à raconter que ceux qui détruisent 400000 véhicules (et non pas 15000, nous avons changé d'échelle) ont des choses pertinentes à dire sur la société. Le problème du racisme en France est là en grande partie : on n'ose pas dire d'un arabe ou d'un noir que c'est une plaie sociale quand il en est une - soit on dit que son acte de délinquance est du à sa triste condition sociale, soit on dit que son acte de délinquance est le seul moyen d'expression disponible pour lui du fait de sa triste condition sociale. Ce silence sélectif pousse des esprits simples à ensuite généraliser de manière abusive sur la base de critères ethniques - généralisations d'ailleurs favorisées lorsqu'un président veut nous faire croire que le débat porte sur le nombre de personnes colorées à la télévision, affirmant implicitement que les faits de novembre avaient une coloration ethnique. Ce silence sélectif constitue aussi un manque : à ces délinquants souvent mineurs manque une figure paternelle ; dire à des casseurs que leur propos est légitime mais employé par le mauvais canal, ne leur donne aucun repère, ne leur offre pas la possibilité de la prise de conscience.
In fine, comment selon vous nomme t-on le fait de détruire pour contraindre, par peur de destructions ou pire, une société à accepter la vision politique d'une minorité ? Généralement, on appelle cela du terrorisme. Celui-ci est moins criminel que celui du GIA, du FIS ou d'al-Quaida. Mais dans l'esprit, c'est bien la terreur qui justifie tant de complaisance au point qu'il devienne « inacceptable » de proférer des évidences comme l'a fait Doc Gynéco.