Un diable dans la glotte ?

« Derrière un ballon de riesling moitié-vide moitié-plein, naviguons d'une digression à l'autre, devisons de l'actualité judiciaire, politique, culturelle ou tout simplement et largement sociale... en tentant d'échapper aux sentiers balisés de la bien-pensance, sans s'interdire de remarquer qu'on peut aussi aisément être le bien-pensant d'un autre. »

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Bribes de clarté dans un nuage opaque

dimanche VI janvier MMVIII

Tout d'abord, bonne année, meilleurs voeux pour 2008. J'en profite pour préciser que ce blog devrait à présent reprendre sa vitesse de croisière.

Pour ce premier billet de 2008, je ne vais pas tabler sur l'inédit - l'objet de ce blog n'est pas la confection d'une poignée de billets parfaits mais d'un suivi régulier du cours du monde selon ce que j'en aperçois. Je vais donc parler des watchdog en tout genres qui, toujours dans l'exigence d'Etats modérés, ne semblent pas s'appliquer à eux une telle exigence. Ce n'est, certes, pas un scoop que je vous propose, mais certaines choses méritent d'être dites néanmoins. Si on devait se contenter de ne dire que des choses inédites, on perdrait très probablement l'usage de la langue.

Privacy International propose un classement et une carte des « sociétés de surveillance » (surveillance societies), établissant le degré de respect de la vie privée de leurs habitants (lien). La France y apparaît comme un pays de « surveillance extensive ». Vrai, faux, bien, pas bien ?

Privacy International nous donne ses critères pour établir ce résultat : « une constitution existe t-elle et protège t-elle la vie privée » (Does a constitution exist and does it, even within the shadows of other rights, protect privacy?) ; « existe t-il une carte nationale d'identité, est-elle biométrique » (Is there a national identity card, and does it involve biometrics?) ; « les entreprises sont-elle contrainte de délivrer des information au gouvernement » (Are companies required to hand information over to government?) ; « dans quelles conditions la police peut-elle intercepter des communications » (When can police intercept [communication]? E.g. 'Reasonable cause', 'probable cause', etc.), etc.

Ces critères semblent pertinent globalement (exception faite pour certains qui sont purement subjectifs : « ce pays met-il en oeuvre des outils biométriques inutiles aux frontières, comme les empreintes papillaires sur les passeports ? » ; Is a country implementing unnecessary biometrics at borders, e.g. fingerprints in passports?) pour déterminer si la population d'un pays est surveillée ou pas, cela ne fait pas de doute. Et on peut raisonnable déduire que la population française est surveillée.

Mais en rien cela ne me semble justifier un jugement de valeur : l'essentiel est de savoir à quoi sert cette surveillance. Pourtant, dans l'échelle de valeur proposée par Privacy International, le fait d'être une société de surveillance est opposé au fait d'être une société qui « de manière cohérente garantit le respect des droits de l'homme » (consistently uphold human right standards). Ainsi, selon ces critères, être surveillé en Chine équivaut à être surveillé en France. Le pouvoir Français serait comparable au pouvoir Russe. Pire, la séparation des pouvoirs connue en France, inconnue dans d'autres pays, est indifférente. Gênant, tout de même, comme démarche, s'il s'agit de déterminer le respect des droits de l'homme, dans lesquels la séparation des pouvoirs est bien plus discriminante que la vie privée. Ainsi, un des critères est le fait que « le Gouvernement peut entrer dans les domiciles sans mandat » (Warrant regimes, e.g. Governments entering homes without warrants) : de prime abord, la France est un tel pays, le mandat de perquisition n'existant pas ; mais ce n'est pas le Gouvernement qui entre dans les domicile, ce sont des policiers ; et ces policiers le font en qualité d'officier de police judiciaire. Un tel critère méconnaissant totalement la séparation des pouvoirs est donc totalement biaisé. Et il est significatif du biais global de l'étude où l'on confond surveillance et exploitation malicieuse de la surveillance - à aucun moment, d'ailleurs, cette étude ne semble prendre en considération le fait que la surveillance puisse être un moyen de protection des droits de l'homme, l'action judiciaire, confondue avec l'action gouvernementale, n'est vue que comme intrusion néfaste.

Résistons ensemble contre les violences policières et sécuritaire mérite le coup d'oeil aussi. Non, promis, je ne taperais pas sur l'ambulance, il est bien entendu que je ne vais pas relever les multiples propos partiellement ou totalement diffamatoires contenus dans ce périodique à l'adresse d'une certaine catégorie de serviteurs de la Nation. Non, ce qui attire mon attention, c'est d'autres passages qui révèlent, pour ceux qui en douteraient, que le message de fond n'est pas de simplement lutter contre des dérives policières, mais bien de contester le concept même de police.

Ainsi, dans le numéro de décembre (lien) on apprend qu'en « Novembre 2007, [...] [lors d'une] manifestation de la fonction publique, dans le cortège les bleus défilent sous la bannière des syndicats, UNSA Police, FO, CGT... sur une banderole, on peut lire "CRS au service du peuple" ». L'auteur de l'article en déduit que « les bleus envahissent notre vie quotidienne, la transformant et nous transformant par la même occasion » et conclue : « flics violents ou gentil, autour de nous, avec nous, on n'en veux pas ! ». Époustouflant brin d'honnêteté, la revue qui est contre les dérives policières reconnait qu'elle est tout simplement contre la police, et l'idée même d'un flic sympa lui est insupportable.

On ne s'étonne pas d'apprendre qu'au yeux des auteurs de la revue, l'agression d'un fonctionnaire de police en raison de son activité professionnelle, parce qu'il a apporte un témoignage concluant dans une procédure judiciaire, n'est que « signification un peu rude que les "balances" ne sont pas les bienvenues dans le quartier ». Manifestement, cette haine de la police s'applique aussi à la Justice, puisqu'il ne s'agit là rien de moins que d'entraver l'action judiciaire en essayer de terroriser les témoins, dites « balances » chez les délinquants.

Ces surveillants qui n'aiment pas la surveillance sont décidément facétieux. A se demander quel est leur monde idéal, sur un plan judiciaire.

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«  9 janvier, La charge est lourde mais peu précise ; un éléphant, ça (se) trompe énormément ?   

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