Un diable dans la glotte ?

« Derrière un ballon de riesling moitié-vide moitié-plein, naviguons d'une digression à l'autre, devisons de l'actualité judiciaire, politique, culturelle ou tout simplement et largement sociale... en tentant d'échapper aux sentiers balisés de la bien-pensance, sans s'interdire de remarquer qu'on peut aussi aisément être le bien-pensant d'un autre. »

.

Ici :

Ailleurs :

Laisser à la stupeur le temps de trouver ses mots

lundi XXI août MMVI

« Ne pas faire de plan, disait Péguy, suivre des indications. Pour comprendre l'homme ou, au moins, l'époque, remplacer l'éternelle question : "Qu'est-ce que... ?" par l'inlassable question : "Qu'est-ce qui se passe ?" Travailler, avec patience, dans les misères du présent. Laisser à la stupeur le temps de trouver ses mots. Ne pas écrire un journal, ne pas tomber dans la chronique, ne pas tenir le registre de mes premiers mouvements, ne pas fixer chacune de mes impressions, ne pas thésauriser mes humeurs, mais déchiffrer comme l'énigme du Sphinx chaque interpellation par les circonstances. Penser sur le mode de la hantise et non du système. Préférer l'insistance de l'émotion à l'exhaustivité de l'inventaire. Plutôt que de m'évertuer à tout couvrir, effectuer des prélèvements. Croire, avec William Blake, que "l'éternité est amoureuse des oeuvres du temps". Extraire le mémorable du flot de l'actualité. Suspendre, pour cette opération, le partage canonique de l'éminent et de l'anodin. Tenir les détails en haute importance. Ne pas prendre l'information pour le fait ni non plus l'information embarrassante pour une construction malveillante. Me méfier de la méfiance autant que de la crédulité ; soupçonner le recours systématique au soupçon de protéger l'intelligence contre les insolences de la réalité. Chercher la vérité dans ce qui apparaît et non derrière les apparences [...] Placer les idées générales sous la surveillance des cas particuliers [...] Renoncer, pour interroger les évènements, au désir de surplomber une fois pour toute l'histoire [...] » (Finkielkraut Alain, L'imparfait du présent, Paris, 2002, p. 9-10).

Voilà un programme inspirant dans le cadre de la tenue d'un blog. Inspirant mais loin d'être l'évidence même. Je me souviens des débuts de mon blog, alors même qu'il se situait ailleurs, sous un autre nom, vers 2003 ou 2002, je ne sais plus : persuadé d'avoir des choses passionnantes à dire (ce qui est bien nécessaire pour écrire), mon orgueil (hubris, devrais-je dire en toute honnêteté) me donnait l'envie de « thésauriser mes humeurs », pour en garder une mémoire, au cas où. Je vais tâcher de me surveiller mais je ne ferais aucune promesse !

J'en viens à présent à l'actualité. Ce n'est point un secret que je n'apprécie pas du tout l'association « Réseau éducation sans frontière » (lien) que je tiens pour être un groupuscule d'immodérés prétextant parler d'éducation pour dire tout autre chose, notamment pour remettre en cause l'idée même de Nation (est-ce la vérité derrière les apparences ou la vérité dans ce qui apparaît ? - peu importe, concentrons-nous sur ce qui se passe). Pour autant, je trouve épatant qu'un individu nommé médiateur de la République, l'avocat Arno Klarsfeld, puisse se permettre d'accuser cette association de démagogie parce qu'elle a poussé des clandestins n'ayant aucune chance d'être régularisé à se faire connaître par les services administratifs « alors que qui n'étaient pas repérés par les services de police » (AP, lien).

Me Klarsfeld précise que « maintenant ils vont avoir un arrêté de reconduite à la frontière. RESF a une responsabilité vis-à-vis des familles qu'ils ont poussé à se déclarer à la préfecture alors qu'ils savaient qu'elles étaient hors champ de la circulaire ». Que RESF soit une association démagogue, jouant sur les sentiments en n'évoquant jamais le sens des lois sur l'immigration, qui paraissent tomber du ciel des mains d'un esprit malin, la chose est entendue. Mais il est tout autant, sinon plus, démagogique, lorsqu'on est chargé de mettre de représenter la République, et donc ses lois, essence même de la souveraineté nationale, de revendiquer le fait d'avoir dit à une mère célibataire clandestine avec un enfant de six mois réclamant des papiers : « vous n'avez aucune chance, faites-vous la plus petite possible ».

Allons-bon ! Il n'y a pas de scandale plus grand que de prétendre parler au nom de la République, d'en être son médiateur, et dans la foulée de donner des conseils dont l'esprit est de faire échec à l'application des lois de la République. Si Me Klarsfeld voulait que cette clandestine puisse rester sur le sol français, alors son devoir de citoyen était de recommander et voter pour des changements législatifs allant en ce sens ; quoi qu'il en soit, son devoir, son droit, de médiateur n'était certainement pas de tenir des propos au nom de la Nation qui desservent la volonté nationale exprimée par les lois.

.

« 23 août, Un splendide isolement   

   23 juillet, La mise à l'index en démocratie où l'amour comme un devoir »

1. Enchanté

Merci pour ton commentaire. Je lis ton blog et pourqoui pas, je mettrai un lien.

Bonne route et à bientôt en Alsace ( 21 et 22 septembre au WACKEN)

Posté le 23.08.2006 à 12h11 par jacques
Pseudonyme, nom :

Adresse (url, courriel) :

Titre du commentaire :

Commentaire :

Retour à l'index