Un diable dans la glotte ?

« Derrière un ballon de riesling moitié-vide moitié-plein, naviguons d'une digression à l'autre, devisons de l'actualité judiciaire, politique, culturelle ou tout simplement et largement sociale... en tentant d'échapper aux sentiers balisés de la bien-pensance, sans s'interdire de remarquer qu'on peut aussi aisément être le bien-pensant d'un autre. »

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Vieille nation cherche statues

mardi VII novembre MMVI

« Nous avons attaqué sans tarder la statue de Staline. La démolition a duré cinq heures, parce que la statue avait été très bien conçue. [...] C'était une vraie histoire entre Gulliver et les Lilliputiens ! Nous ne cessions de tirer sur cette charogne par tous les moyens sans qu'elle bouge. Jusqu'au moment où quelqu'un a eu l'idée de génie d'attaquer ses bottes avec un fer à souder. [...] Dans la nuit qui descendait sur nous, les étincelles couraient le long des tiges de ses bottes. Les petits bonshommes tiraient fort par en bas et ont finalement réussi à faire descendre ce gros bidule » (Farkas André, Budapest 1956, Paris, 2006, p. 64 cité in Kende Pierre, « Budapest, 1956 : la révolution confisquée », in L'Histoire, n°314, Paris, novembre 2006, p. 77)

Où sont nos statues, celles de la Vème République ? Quels grands hommes français célèbre t-on ? Je ne parle pas de faire un inventaire des exceptions ; on en trouvera toujours. Mais quand mettons-nous en avant ceux qui ont fait de la France un grand pays ? De quoi est fait notre univers symbolique national, sinon de legs vieux de plus de 50 ans, sauf cas très exceptionnels ? Quelles statues pourraient bien déboulonner des révolutionnaires ?

J'ai lu à plusieurs reprises des propos qui m'ont semblé du plus ridicule, associant les racailles à des révolutionnaires, à ceux de la Révolution française notamment. Ceux qui tiennent ce discours n'ont sans pas du souvent discuter avec les personnes dont ils parlent, pour se méprendre à ce point sur l'état d'esprit de ces individus qui ne revendiquent que la toute puissance pour eux.

Dans quelle mesure l'absence de références nationales, de statues à déboulonner, ne participe t-elle pas à cette bêtise ambiante où les crises d'adolescence ne sont plus les cris de rebellions naturels et formateurs face à la prise de conscience des faiblesses du monde mais les cris de haine de jouisseurs qui ne se posent jamais la question du bien commun ?

Loin de moi l'idée de faire installer des statues de gens contestables pour avoir le plaisir de les voir déboulonnées. Loin de moi l'idée que, si des statues de grands hommes comme de Gaulle étaient déboulonnées, il faudrait s'en féliciter. Mais, enfin, ce serait tout de même le signe d'une forme d'intelligence sociale de la part de ces adolescents s'ils s'opposaient à des symboles précis.

Or, nous n'avons plus de symboles, à l'image des euros, des billets sans âme, sans visage, froids : aucune personnalité ne figure dessus sous le prétexte abruti que les personnalités nationales sont vues différemment selon les Nations ; alors quoi, l'Europe signifie se résoudre au plus petit dénominateur commun ? N'y a t-il pas de personnalités dignes dans chaque pays, de ne pas être haïes ? Charles de Gaulle, Winston Churchill, Otto von Bismarck, Miguel de Cervantes, Philippe Leclerc, Martin Luther, Socrate, Wolfgang Amadeus Mozart, Marcus Tullius Cicero (Cicéron), William Shakespeare, etc. N'avons donc nous rien d'autre que des ponts et des batiments à partager entre Européens ?

Parmi les rares bribes symboliques qui nous restent figure cet hymne national qu'on n'impose même pas de chanter à des sportifs qui portent le maillot bleu-blanc-rouge. Un hymne qui est sifflé par des individus disposant de la citoyenneté française. Un hymne que certains voudraient adoucir, à tout prix ôter son ton guerrier, renier le contexte même de son écriture, c'est à dire du refus des monarchies européennes de tolérer la naissante République. Est-ce que siffler cet hymne peut-être un signe rassurant d'intelligence sociale, de révolte au sens politique ? On est tout de même obligé de constater que ce symbole là est comme le drapeau : un élément constitutif de la France. Mais surtout, on doit remarquer que ce n'est pas la valeur du symbole qui est attaqué, ce n'est pas l'idée de Nation qui est attaqué (comme ce serait le cas dans un discours anarchiste, etc), c'est la Nation française spécifiquement. C'est au nom d'une autre Nation, l'Algérie, qu'on attaque ce symbole constitutif de la France. Ce n'est donc pas pour changer la France que le symbole est attaqué, c'est pour la renier.

Nous ne disons plus qui nous sommes, nous ne sommes plus fier d'être, nous ne proposons rien. Comment s'étonner de problèmes d'intégration lorsqu'il n'y a plus rien à intégrer ? On n'offre aucune émulation de l'intellect, on n'invite pas l'adolescent à repenser le monde mieux qu'il n'est, on l'invite à jouer au roi de la jungle - à la racaille.

On fabrique des abrutis. Et certains croient encore que ces abrutis ont quelque chose à dire. Certains semblent croire que les paysans en colère à la fin du XVIIIème portaient des habits aussi coûteux que ceux de la cour royale et avaient pour loisir de brûler la ferme de leurs voisins miséreux. Certains semblent croire qu'il y a proximité d'esprit entre ceux qui ont chanté la Marseillaise et ceux qui la sifflent.

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