Un diable dans la glotte ?

« Derrière un ballon de riesling moitié-vide moitié-plein, naviguons d'une digression à l'autre, devisons de l'actualité judiciaire, politique, culturelle ou tout simplement et largement sociale... en tentant d'échapper aux sentiers balisés de la bien-pensance, sans s'interdire de remarquer qu'on peut aussi aisément être le bien-pensant d'un autre. »

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Peine capitale et concorde civile

lundi VIII mai MMVI

Hier soir, j'ai regardé France 2, « Faites entrer l'accusé ». Cette émission était un vaste plaidoyer pour Ranucci, condamné à mort pour avoir tué un enfant.

Je ne vais pas m'étendre sur la tonalité de l'émission, ni sur sa teneur. J'en ai déjà longuement parlé sur un commentaire sur lien

Je constate simplement que la question de la peine de mort était au moins en filigrane tout au long de cette émission, sinon plus. Et cela avec un parti-pris évident, celui de l'opposition à la peine de mort.

Cela paraît être une évidence. La France a signé tant de traités internationaux à ce sujet qu'il ne paraît plus envisageable qu'elle puisse pratiquer une telle sanction pénale.

Du coup, on a beau jeu, en 2006, d'évoquer cet avocat général qui requiert la peine capitale en donnant vaguement l'image d'un homme sans coeur ; j'ai l'impression que c'était l'image qui en fut donnée. Image peut-être juste, je n'en sais rien, d'ailleurs. Mais le regard critique qui se pose sur cette image est celui de 2006, et cette idée de froideur me semble être partiellement anachronique.

On interroge tel juré et ce dernier dit qu'il était d'emblée favorable à la peine de mort. Une autre déclare qu'elle était contre cette peine par principe. Là encore, j'ai comme l'impression d'être oppressé par l'actualité, d'être contraint de ranger ces jurés qui ont voté la mort dans une petite case, au nom des valeurs de 2006. J'ai l'impression que la porte à la réflexion n'est pas ouverte.

Que dire, sinon que j'ai pu rencontrer fréquemment deux discours sur la peine de mort. Le premier, le plus basique, est une forme simplifiée de la loi du Talion, appliquée en immodération (à l'origine, la loi du Talion permettait d'éviter qu'un conflit se perpétue d'années en années, avec des vengeances de plus en plus lourdes ; une réparation par stricte équité valait clôture des comptes - c'est brutal pour un État de droit, c'est particulièrement pacifiste dans une société de vendetta), il s'agit de punir le criminel par sa mort. Le second, plus élaboré, est celui de l'opposition à la peine mort : ôter la vie est immoral, si l'on condamne le meurtre, on ne peut le commettre ; par ailleurs, la sanction est définitive, grave problème en cas d'erreur.

J'ai pendant longtemps tenu ce second discours. Et aujourd'hui, je suis dans le doute, je n'ai pas de réponse à donner à cette question. Je me satisfait de l'existant, je n'ai pas envie d'un changement législatif, d'un rétablissement de la peine de mort. Mais je ne regarde plus avec des gros yeux ceux qui tiennent le premier discours.

Parce qu'après tout, c'est vrai qu'ôter la vie, c'est immoral, que tuer c'est toujours grave. Mais qu'est-ce qu'une réclusion criminelle sinon une séquestration ? Est-ce plus moral de laisser quelqu'un à vie entre quatre murs ? Moi je ne trouve pas de réponse à pareil dilemme.

Par contre, quand je vois des cas comme Pierre Bodein, condamné à plus de 30 ans de prison pour des crimes (dont viols), qui une fois en libération conditionnelle récidive (viols et meurtres) je ne suis sur que d'une chose : je n'ai pas envie que tel homme puisse à nouveau être sur la voie publique. Alors quelle peine sera morale, ou en tout cas la moins immorale, pour caser cet individu là ?

Quant à la question de l'aspect définitif de l'erreur judiciaire, toujours en prenant le cas Bodein, on peut dire que le remettre en liberté fut une erreur très définitive pour ses victimes.

Une société peut-elle tuer au nom de sa protection ? Le concept me met très mal à l'aise, mais je refuse désormais de faire les gros yeux à ceux qui ont un parti-pris, quel qu'il soit. Si ma conscience personnelle ne m'autorise aucun des deux parti-pris, j'accepte qu'il en soit différent pour d'autres, sans mépris. Quelque part, je suis persuadé que les deux parti-pris ont un fond profondément humaniste, font hommage à la vie et à la concorde civile, même s'ils s'expriment très différemment.

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«  9 mai, La défaite du terrorisme   

    5 mai, Lorsque la botte de foin est enflammée, il faut chercher l'aiguille »

1. <lien>

"Là encore, j'ai comme l'impression d'être oppressé par l'actualité, d'être contraint de ranger ces jurés qui ont voté la mort dans une petite case, au nom des valeurs de 2006."

Tiens donc, deviendriez-vous relativiste quand ça vous arrange ?

Posté le 31.01.2007 à 16h35 par le passant

2.

En effet, ça m'arrange d'être relativiste lorsqu'il s'agit de juger les hommes du passé. Faute de quoi il s'agirait de jugements anachroniques :)

Je fuis la relativité lorsqu'elle interdit d'avoir un avis sur le présent et confine à l'inaction, pas lorsqu'elle permet de saisir le passé, pour qui de toute façon le temps de l'action est révolu.

Posté le 31.01.2007 à 17h37 par Marcel Patoulatchi

3. Le ravisseur d&#8217;Enis, un "pédophile" déj&a

« L&#8217;enfant de 5 ans, retrouvé vivant à Roubaix vers minuit, aurait été victime au minimum "d'attouchements".

Il n&#8217;a suffi que de dix heures pour retrouver Enis, cet enfant de 5 ans disparu mercredi après-midi à Roubaix. «L'enfant a été retrouvé vers 00h10. Il est hospitalisé pour un contrôle médical. Il est en bonne santé», selon la direction centrale de la police judiciaire à Paris. D'après une source proche de l'enquête, le garçonnet aurait toutefois été victime "au moins d'attouchements".


Son ravisseur présumé est «un pédophile» déjà condamné pour des agressions sexuelles sur mineurs. L'homme de 61 ans, en garde à vue depuis mercredi soir dans les locaux de la police judiciaire à Lille, «a déjà fait 20 ans de prison pour des affaires d'agression sur mineurs. Il venait d'être libéré il y a environ un mois».


Dans un box fermé avec l'enfant


L&#8217;homme a été interpellé alors qu'il se trouvait avec l'enfant dans un parking, un box fermé, qu'il louait à Roubaix. Une arrestation rendue possible par des témoignages reçus après la diffusion de l'alerte-enlèvement. Le témoignage d'un chauffeur de taxi aurait notamment été déterminant.


Le jeune Enis avait disparu peu après 14 heures alors qu'il se trouvait dans une rue où se déroulait une braderie à une cinquantaine de mètres de chez lui dans un quartier populaire de Roubaix. C'est son père, d'origine turque, qui avait alerté la police. »

Posté le 16.08.2007 à 13h31 par Anonyme courageux
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